Séoul Blues
Petite critique revue à la hausse. Avec un nouveau regard sur la Corée et particulièrement sur Seoul, j'ai pu apprécier ce film d'une manière bien différente. La première fois que je l'ai vu, en octobre 2005 au PIFF, je n'étais encore jamais allé à Seoul et je ne pouvais pas comparer le film à mon expérience personnelle. Et c'est justement intéressant de faire une comparaison entre les différents points de vue, le recul du spectateurs ou au contraire son implication dans le sujet. À l'époque, je n'avais vu le film que comme un pamphlet accusant de grave conditions de travail, et me plaignait de la longueur du film (qui n'est pas si long) qui était une suite de scènes où le chauffeurs/réalisateurs transporte des clients à travers la ville. On y voit l'éclectisme dans le métier avec un nombre infini de types de clients. Mais il y montre également sa propre vie en se filmant chez lui, au siège de sa société de taxi ou dans un poste de police, tout cela entrecoupé de manifestations, accidents, notes de services. Le sujet est extrêmement intéressant mais il manquait quelque chose pour réellement apprécier le film dans son tout.
Taxi Blues n'est pas un film pour les non-Coréens. On s'y sent trop... étranger. Il est impossible de vraiment s'impliquer dans un film où on ne comprend pas l'essence même du film. Et cette essence, pour la comprendre, il faut être Coréen ; ou plutôt, il faut avoir passé assez de temps à Séoul. Et là, le film n'est plus qu'un documentaire sur la condition des chauffeurs de taxi, mais une visite guidée de Séoul par un chauffeur de taxi. Et on se rend compte que ces gens, ces chauffeurs, sont les vrais témoins de la vie. Ils sont partout, on ne fait pas attention à eux, mais ils voient tout. Cette affirmation que fait le réalisateur en plein milieu du film est particulièrement révélatrice de cet état de fait : "En fin de soirée, les gens jouent leur mélodrame sans se rendre compte que, juste à coté d'eux, il y a un taxi qui attend qu'ils aient fini." On voit les quartiers, on les reconnaît, et c'est quand on se rend compte qu'on se sent impliqué dans les scènes à bord du taxi qu'on se met à aimer ce film.
Tout le documentaire vit vraiment dans cette ambiance blues indiquée dans le titre, car Ha Dong-Ha n'est vraiment pas un manche et arrive à capturer toute l'essence de sa ville et de son métier dans des choix de cadre (caméra un peu partout dans la voiture ET à l'extérieur) et de montage adapté à ce qu'il recherche. Pendant toute l'année où il a travaillé en tant que chauffeur de taxi, il est vraiment rentré dans son métier, et se permet également quelques scènes de fictions pour montrer tout ce qu'il ne peut pas faire à l'écran (casser la figure à un gars, causer un accident...). Taxi Blues est finalement un excellent film faisant à la fois état des mauvaises de travail dans le métier de taxi, et est un grand témoignage de l'ambiance de la ville de Séoul. Et si la chanson de Jaurim "Seoul Blues" avait existé en 2004, elle aurait été parfaite pour ce film. Allez, un petit remontage ?
16 décembre 2007
par
Elise