Mauvais film, mais pur objet documentaire
Pur film culte par excellence, The Story of Wong Fei-Hung, part 1 est le pionnier d'une longue série qui compte à ce jour plus de 70 épisodes différents, tous à l'effigie du maître en arts martiaux Wong Fei-Hung. Bien que dans le fond, assez mauvais et particulièrement mal joué, cette petite production quasi documentaire débutant par un long plan séquence avec deux hommes qui dansent, mérite que l'on s'y intéresse pour son aspect purement historique. Kwan Tak-Hin campe donc pour la première fois le rôle de Wong, ce qui lui permet de mettre en avant toutes ses "qualités" de comédien. En résulte alors quelques séquences involontairement drôles, bien accentuées par la copie proposée très âgée, et une poignée de combats d'anthologie. Ce qui est paradoxal en revanche, c'est cette sur-dramatisation dans le jeu des comédiens alors que les combats font preuve d'une douceur étonnante. On serait même amené à penser qu'ils font tout pour ne pas se faire mal.
L'utilisation des décors représente quelques savoureux moments de bravoure, où l'arrachement des rambardes n'aura jamais été aussi inutile qu'ici, de même que cette manie incessante d'accentuer la moindre chute, pire même, de la provoquer. Dans le fond, le film de Wu Pang est bien mauvais, mais personne ne nous enlèvera le plaisir que l'on éprouve en face de cet objet purement surréaliste, documentaire à part entière, réunion des pires acteurs de l'époque, et curiosité filmique annonçant les futures productions de la série des Drunken Master. Notons d'ailleurs cette surenchère de longueurs inutiles, freinant la dynamique d'ensemble, notamment ces hallucinantes séquences de chants dépassant parfois cinq minutes, qui plus est horriblement interprétées, ou encore ce final qui n'en est clairement pas un. The Story of Wong Fei-Hung est comme une sonnette d'alarme, nous rappelant que le film de Kung-Fu avait quand même de bien belles heures devant lui.
Esthétique : 1/5 - Filmage particulièrement mauvais, mais quelques danses intéressantes.
Musique : 1/5 - On a parfois envie de se boucher les oreilles, mais c'est là tout le charme d'époque...
Interprétation : 1/5 - Des scènes dramatiques à nous en décrocher une larme...de rire.
Scénario : 3/5 - Amusant, au vu de certains métrages contemporains qui proposent le même contenu.
Nanar documentaire
A première vue, l’état de conservation de ce petit film d’1h12 nous ramène tout droit au début des années 30, avec des gros traits et des gros grains qui défigurent l’image, un son affreux poussé au maximum pour qu’on tente de distinguer de faibles voix semblant sortir d’outre-tombe, des sauts d’images incessants… La projection en devient presque un supplice tant la pellicule est abîmée. Sauf que l’on n’est pas dans les années 30, mais bien en 1949, soit 10 ans après Gone with the Wind et 6 ans après La Légende du Grand Judo – c’est dire le retard qu’avait pris Hong-Kong dans le développement de son industrie cinématographique, qui n’est finalement arrivée à maturation que dans les années 60.
C’est donc plus à un film à caractère historique auquel on est confronté ici, tant il est symbolique dans la conception qu’on se faisait du cinéma à l’époque (du gros divertissement populaire, surjoué, vulgairement tronçonné pour inciter les gens revenir au cinéma, mal écrit, scénario anarchique s’épanchant volontairement, longuement et maladroitement sur la culture locale, telles les chorégraphies martiales, la danse du lion ou la chanson traditionnelle), et tant il s’inscrit dans la lignée des films de kung-fu qui ont fait la réputation du cinéma de Hong-Kong. En somme, un film témoignage d’un temps révolu, mais dont les prémices ont donné naissance à tout un pan du 7ème art.