Xavier Chanoine | 3 | Cours Kintarô, cours! |
Ordell Robbie | 1 | Un Miike "mainstream" banal à tout point de vue. |
Tourné la même année que sa série télé MPD-PSYCHO Vol.1 et ses réussis City of Lost Souls et Les Prisonniers du Paradis, Sarariman Kintarô est une petite comédie légère et amusante adaptée du manga de Hiroshi Motomiya, que l'on peut qualifier de mineure, au vu de la filmographie plutôt dérangeante de Takashi Miike. Elle ne pèse pas lourd à titre de comparaison d'oeuvres plus engagées comme Visitor Q ou Blues Harp, mais ne nous risquons pas à rentrer dans ce débat, Kintarô étant avant tout LE film tout public du cinéaste.
Kintarô est un jeune cadre dynamique bossant pour le compte d'une entreprise banale, dirigée par des hauts fonctionnaires sans scrupules. A force de faire face aux magouilles sur magouilles, Kintarô décide de mettre les points sur les i en défiant sa hiérarchie et en mettant ainsi fin à toute forme de corruption. Miike montre alors que toute personne quelconque peut très bien se transformer en héros pour une cause, quitte à y laisser de sévères plumes. Et le bougre a raison. Kintarô (interprété par l'excellent Katsunori Takahashi) enchaîne alors les actes héroïques, comme ce sauvetage d'un gamin dans un immeuble en feu, ou cette tentative de renversement gouvernemental avec ses potes Bikers. Cette mini révolution n'est pas sans répercutions adverses et ce dernier va alors se retrouver avec une milice locale aux fesses qui paierait cher pour avoir sa peau.
Comment se retrouver du jour au lendemain, pourchassé par un peu tout le monde? Demandez à Kintarô, il vous l'expliquera sans soucis. Fort de ses maladresses malgré son envie de bien faire, on ne sait jamais si ce personnage est l'incarnation du héros ou de l'anti-héros. C'est paradoxal puisqu'on le verra se faire lamentablement mettre à mal par un vieux boss yakuza, et dans les jours qui suivent, détruire à lui seul une armée de miliciens avec une rage inouïe. Kintarô, personnage difficilement cernable? On peut en dire autant de son metteur en scène, toujours à l'affût d'un nouveau style et d'un nouveau genre à s'approprier. D'ailleurs, en y regardant de plus près, Sarariman Kintarô se situe entre des oeuvres trash et particulièrement glauques que sont MPD-PSYCHO Vol.1 ou Les Prisonniers du Paradis, toutes deux à des années lumières de ce que propose Sarariman que ce soit au niveau de la thématique abordée, du style visuel, de la narration et j'en passe. L'oeuvre arrive même à être par moment rock'n roll et aussi légère et ironique qu'un She's on duty. Les méchants ne sont pas bien méchants, le héros n'est pas vraiment un héros. On s'en sort avec les moyens du bord en quelque sorte et ce ne sont pas les quelques passages à tabac qui vont nous arrêter. C'est rare de voir une oeuvre de Takashi Miike aussi légère et politiquement correct, à l'image du happy end de fin, mielleux comme un bon Buena Vista des grands jours.
Ce sentiment d'avoir affaire à une oeuvre grand public se ressent aussi dans la réalisation très teenager-like. Déjà l'omniprésence de riffs d'un heavy commercial, ensuite le choix des couleurs alternant spots jaunes et bleus dignes d'un mauvais épisode de Parker Lewis, et puis ces longs plans clippesques sur les Hell's angels montrent clairement que Miike ne veut pas prendre de risques. Qu'elle est loin l'intro au sperm de Ichi The Killer ou encore le montage épileptique d'un Dead or Alive, quoi de mieux à vrai dire pour ceux et celles qui aimeraient découvrir le cinéma de ce fascinant et déroutant cinéaste. Les fans risquent d'être clairement déçus du ton adopté par l'oeuvre (l'introduction fait tout droit penser à un téléfilm Disney!), voguant entre les bons sentiments du style "papa aime son fils", "papa fera tout pour le sauver". On se consolera avec quelques séquences rigolotes, de monumentaux passages à tabac (increvable Kintarô!) et un rythme qui ne faiblit que très rarement.
Esthétique : 3/5 - Zéro prise de risque de la part d'un cinéaste qui nous a clairement habitué à mieux. Musique : 2.75/5 - Par moment bluesy ou carrément commercial. Assez sommaire. Interprétation : 3.75/5 - Excellent Takahashi, c'est avec plaisir que l'on retrouve Tsutomu Yamakazi dans la peau d'un vieux boss. Scénario : 3.5/5 - Ca vous dit de devenir un héro?