Il n'y a pas à dire, ces trois histoires de genre et de réalisation très différentes forment un tout plutôt intéressant. C'est d'ailleurs probablement cette diversité qui fait l'unité de cette production. En effet il est souvent difficile de réunir tous les facteurs qui font un bon film, alors pourquoi ne pas les séparer ?
La rose magnétique est basée sur le suspens et offre un spectacle à la fois pour les yeux et pour les oreilles.
La bombe puante se classe plutôt dans le genre de la comédie et détend l'atmosphère après la tension du premier épisode. L'humour reprend le dessus.
Chair à canon par son graphisme exubérant et surréaliste, nous transporte finalement dans un univers dénué de toute logique et probablement de future. C’est à dire, un film de réflexion.
La réussite de cette compilation tient probablement au fait que chaque film a été réalisé par une équipe différente et donc sans grands points communs. Une bonne soirée en perspective.
Magnetic Rose : 4/5
Rappelant pêle-mêle Alien, 2001, Cobra Space Adventures ou Lost Highway, cet anime étonne par son imagination et sa dimension poétique. Hypnotique, il nous entraîne dans un monde où le sublime fusionne avec le Mal, tour à tour attirant et repoussant, créant aussi bien la plénitude que la peur. Cet univers intemporel est également un lieu de souvenirs, ceux d’êtres chers qui remontent à la surface et rendent mélancoliques. Un opéra spatial captivant.
Stink Bomb : 3,5/5
Jouant plutôt sur la carte de la comédie grinçante, Stink Bomb met en scène une apocalypse chimique dont l’origine est un laboratoire de recherche où un mauvais mélange de médicaments a créé un gaz mortel qui se répand à vive allure. Rythmé et sans happy end, il manque cependant un peu de profondeur pour convaincre totalement.
Canon Fodder : 4,25/5
Mon coup de cœur. Description d’une société fasciste toute entière tournée vers la guerre et la destruction de son ennemi, Canon Fodder fait froid dans le dos car il peut être interprété à des degrés différents : ne partons-nous pas en effet tous les jours « à la guerre » pour défier un ennemi, que ce soit un collègue, une entreprise concurrente ou un pays, dans l’intérêt personnel, collectif ou national ? Vu comme ça, cette ville où chaque toit possède son canon dirigé vers l’étranger prend une toute autre dimension, et si on rajoute la leçon de mise en scène que nous offre Otomo à grands coups de plans séquences inouïs, on obtient un petit chef d’œuvre tout à fait jubilatoire.
pour le premier, la rose magnétique : 3.25
Niveau technique, rien à dire, Morimoto est à la réalisation, ça sent le très travaillé, une animation en or très en avance sur son temps, mais l'histoire bien qu'entraînante sent trop le réchauffé pour vraiment convaincre.
pour le second, la bombe puante : 4.50
É-NORME ! Une histoire bien folle, un rythme d'enfer, une réalisation aux petits oignons. Ouaw ! Un vrai grand plaisir d'animé nippon.
pour le dernier, cannon fodder : 3.75
Otomo s'amuse à toucher un autre style et réussit son pari comme toujours. Un style qui m'a fait penser aux Triplettes : même palette de couleurs, même personnages crayonnés, même utilisation de la 3D texturée 2D, même plan séquence passant d'un fond à l'autre ni vu ni connu, même dialogues minimaux, même son hyper travaillé. Plus j'y pense, plus les points communs sautent aux yeux. Franchement ça sent l'influence majeure pour Sylvain Chomet, créateur des Triplettes. Et une belle histoire en plus, simple et forte.
Vraiment, le travail d'Otomo n'est surement pas surestimé. ;p
Mettre bout à bout trois histoires courtes est finalement devenu relativement classique au Japon. Ce procédé nous a ainsi livré quelques petits joyaux comme Manie Manie, The Cockpit ou ici Memories. Trois histoires dont seule la première traite vraiment de la mémoire, la qualité exceptionnelle de celle-ci justifiant d'ailleurs pleinement que ce titre ait été choisi !
Morimoto Koji est l'auteur de ce petit chef-d'œuvre, Magnetic rose. Une quarantaine de minutes de pur bonheur ! Une réalisation juste (animation, cadrages, reliefs, différents niveaux d'animation, tout y est ! L'ensemble graphique, la photo, est impressionnant !), un très grand soucis du détail, des mecha/robots irréprochables, un chara design de grande qualité... Ne serait-ce que le traitement de l'apesanteur est remarquable ! Ainsi on obtient un résultat visuel plus qu'impressionnant, un anime aux graphismes magnifiques ! Ajoutons à cette réussite graphique une utilisation juste et de qualité de l'outil informatique (même si l'intégration n'est pas absolument parfaite, certaines scènes tranchant un peu, ces techniques nous donnent tout de même des travellings et autre mouvement de "caméra" mémorables). Mais c'est l'ensemble de la mise en forme qui est exceptionnelle. En effet cet anime ne friserait pas ainsi la perfection sans une musique magnifique, que les fans de musique classique et d'opéra sauront apprécier à sa juste valeur. Entre musique classique et opéra, une composition qui contribue indéniablement à créer l'ambiance si étrange de ce magnifique film.
L'histoire ensuite sonne incroyablement juste. Cette balade dans un univers féerique, réminiscence d'un passé prestigieux, échappatoire permettant de vivre dans la mémoire et de fuir la sombre réalité, cette balade donc dans ce monde de folie au bord de l'effritement est incroyablement profonde, touchant du doigt cette volonté si souvent éprouvée par tous de fuir un présent douloureux pour se réfugier dans les heures heureuses... Faire passer autant d'émotions dans un temps si court est une gageur que l'équipe du film a parfaitement tenue ! Chapeau !
Une histoire riche, une atmosphère indescriptible de mélancolie et de tristesse, le tout couplé à un dessin et à une musique de toute première qualité et qui se complètent plus qu'admirablement font de ce premier volet un incontournable pour tous les fans de Japanime !
Vient ensuite Stink Bomber, une quarantaine de minutes là encore pour une réalisation une nouvelle fois soignée, avec un grand souci du détail (il suffit d'observer les décors, les montagnes en particulier, pour s'en persuader), des mechas particulièrement réussis (chars, avions, hélicos...). Le chara-design peut quand à lui être plus discutable (les persos ne sont pas particulièrement beau, le nez du personnage principal en particulier est particulièrement proéminent).
Le sujet quant à lui est relativement intéressant, souvent traité avec une très légère touche d'humour et un certain goût du décalage (la musique se fait par exemple souvent légère et entraînante, même si elle deviendra plus grave et angoissante sur la fin, alors que le poison draine la mort, les fleurs également qui poussent tel un beau linceul contrastent fortement avec la situation...).
Un volet intéressant, sans grandes ambitions pourtant, avec une petite touche d'anti-américanisme en prime...
Enfin la dernière de ces trois "nouvelles", Canon Folder, qui, bien que réalisée par le célèbre Otomo Katsuhiro, est celle qui présente, à mes yeux tout du moins, le moins d'intérêt... Un usage massif de l'informatique, intégré avec plus ou moins de bonheur, pour donner des paysages, une ville ou encore des mechas assez grandioses. Pourtant le chara-design, bien qu'original, ne m'attire que très moyennement. Des traits marqués, des personnages extrêmement caricaturaux, un trait rappelant fortement le crayonné, détaillé et soigné, visant à installer une atmosphère, mais auquel décidément je n'accroche pas.
Quant au scénario, sa profondeur me laisse songeur, un délire bizarre finalement peu porteur de sens. Une volonté sarcastique pour dénigrer la guerre, avec une musique plus proche du cirque que des musiques militaires solennelles, une allure martial inappropriée et risible des officiers... Une moquerie de la guerre et des militaires qui peine pourtant à prendre son envol... Il est cependant intéressant de voir cette nation tournée vers la guerre et surtout une paranoïa défensive, symbolisée par tous ces canons, l'image peut être particulièrement cocasse au Japon qui a vécu si longtemps enfermé sur lui même...
Des histoires dont la qualité va décroissant, mais dont les immenses qualités de la première justifie pleinement l'achat de la vidéo !
Comme Manie-Manie ou Robot Carnival (films auquel Otomo a aussi collaboré), Memories regroupe plusieurs sketches qui, comme le titre l'indique, tournent autour du thème de la mémoire.
L'histoire la plus marquante est très certainement la première, Magnetic Rose, qui est à la fois un mélange de poésie et de cauchemar cybernétique ou l'on voit des astronautes bloqués dans un vaisseau habité par la mémoire d'une ancienne diva oubliée. Le résultat est véritablement époustouflant, notamment au niveau du mariage réussi entre une réalisation grandiose et une musique magnifique et envoûtante.
Le deuxième segment, Stink Bomb, joue à fond la carte de la comédie grinçante. L'humour est présent tout au long d'une histoire complètement délirante ou un malheureux employé se transforme en véritable bombe bactériologique. Malgré cela, le fond du sujet reste tragique, ce qui permet au réalisateur de dénoncer au passage le ridicule et l'inconscience des politiciens japonais et autres militaires américains.
Enfin le dernier sketch, Cannon Fodder, réalisé par Katsuhiro Otomo est lui aussi très étonnant. A travers la description du quotidien d'une ville forteresse rythmé par une guerre contre un ennemi invisible, Otomo nous décrit la vie d'une société sans avenir qui a oublié pourquoi elle se bat, et qui est prise au piège d'une logique militaire bête et méchante.
Memories est donc un film magnifique qu'il faut vraiment voir à tout prix. Chaque histoire est réalisée à la perfection, l'animation est à tomber par terre et même la bande originale du film est exceptionnelle, avec des musiques variées qui collent parfaitement á l'ambiance de chaque sketch. Un pur chef d'œuvre.