Faire les fines bouches…ou pas.
Le réalisateur SHINAGAWA Hiroshi a créé la surprise en 2009 avec "Drop", premier long semi-biographique, qui réussissait à créer une approche plutôt sérieuse du film de baston lycéen alors à la mode suite au succès phénoménal de "Crows 0". Les attentes étaient donc grandes pour son second, "Manzai Gang" (aka "Slapstick Brothers"), surtout qu'il s'agissait d'une autre partie de la vie de ce véritable multi-talents.
"Manzai Gang" s'intéresse donc aux années passées en tant que membre d'un duo comique de Shinagawa. Ces duos sont généralement formés d'un "boke", personnage désopilant et d'un "tsukkomi", qui contrebalance justement la folie de son partenaire par ses attitudes plus relationnelles et sérieuses.
Le "manzai" repose avant tout dans la dénonciation des petits travers de la société nipponne…et dans ses très nombreux jeux de mots…premier obstacle à la pleine appréciation de ce film; car sans être au courant de toute l'actualité nipponne et à moins de parler couramment la langue japonaise pour saisir l'ensemble des subtilités, on passera à côté d'une bonne partie du film…or la version "officielle" sous-titrée par sa maison de production japonaise (lors de sa présentation au Marché de Cannes en 2011) est loin de rendre compte de toute la richesse des joutes verbales entre les deux protagonistes…un peu à l'image de la plupart des sitcoms américaines pauvrement (car trop rapidement) traduites et adaptées en VF.
Reste alors le second aspect du film, l'histoire en elle-même. Pleine de rebondissements et ne cessant de mettre en parallèle la vié épisodique des personnages avec le rythme particulier d'élocution des manzais dans leurs spectacles, l'intrigue est également beaucoup trop convenue pour pleinement convaincre. S'il est assez intéressant (voir un peu poussif) de suivre toutes les étapes créatives d'un duo de manzai, fidèlement retranscrites de Shinagawa, qui sait visiblement de quoi il parle, toutes les sous-intrigues et embrouilles parallèles font un peu toc, surajoutées et rallongent inutilement un film dépassant largement les deux heures.
Guette alors les mêmes travers constatés que dans "Drop": les meilleures intentions en font pas toujours le meilleur film et entre le stand-up, le manga (l'autre gagne-pain de Shinagawa) et le support filmique il y a des très grands écarts, qu'il faut apprendre à maîtriser avant de pouvoir s'exprimer pleinement. Shinagawa tourne "à l'instinct", mais l'ensemble est encore une fois trop brouillon, pas assez tenu pour pleinement convaincre…Mais – encore une fois – une bonne partie des vraies qualités du présent film se perdent vraisemblablement dans les problèmes de traduction et d'adaptation…
