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Jour et nuit
les avis de Cinemasie
2 critiques: 2.75/5
vos avis
7 critiques: 3/5
Beau mais trop raide
Avec Jour et Nuit, Wang Chao confirme son goût pour ce que l'on pourrait qualifier de "cinéma de maître". L'Orphelin d'Anyang prenait d'ailleurs comme modèle stylistique avoué une certaine rigueur bressonienne. Sauf que cette fois Wang Chao bénéficie d'un script moins bancal et se prêtant mieux à ses parti pris formels "rigoureux".
La leçon classique est d'ailleurs ici à peu près bien récitée: cadrages précis, longs plans séquences, plans larges très distants, mouvements de caméra aussi rares que calculés, parole détachée de l'image par le choix de plans distants. Et cette fois Wang Chao bénéficie d'un superbe score au diapason de l'aridité de l'ambiance générale du film et d'acteurs bons dans la retenue. Le scénario offre également l'occasion d'envisager autrement la démarche du cinéaste. On le classait plutôt du côté d'un certain cinéma "non officiel" aux visées naturalistes alors que le script de Jour et Nuit le montre tentant de concilier naturalisme, intrusions d'éléments surnaturels et ambition de densité romanesque. Tout le film est ainsi construit sur un mode binaire. La mort de son mentor lors d’un coup de grisou est pour le héros l'occasion de mesurer ses nouvelles puissances et impuissances. Auparavant, il était la figure de l'amant sexuellement puissant de la femme de son mentor, ne se sentant coupable de rien mais socialement faible. Suite à la mort de son mentor, il est désormais puissant financièrement, libéré d'un rival mais impuissant sexuellement et moralement tourmenté par cette mort. Passages naturalistes et apparitions fantômatiques du vieux mentor alternent d'ailleurs tout le long du film.
Ce n'est d'ailleurs pas que les thèmes de la faute et du rachat sentent les références littéraires qui seraient mal digérées. Il s'agit en effet ici d'évoquer la question du désir de repentir, repentir ne faisant qu'engendrer une nouvelle faute. Mais c'est la façon dont cette thématique philosophique s'ancre dans une réalité sociale concrète qui pose problème. Car voir dans l'évolution du héros une métaphore de l'évolution de la Chine contemporaine vers plus de libéralisme économique donne alors à l'arsenal scénaristique du film le goût du symbolisme à la main très lourde sur les rapports passé/présent de la Chine, communisme/libéralisme de fait, changements historiques rapides/prix à payer pour ces changements... En tirant de façon un peu forcée sa mécanique scénaristique vers le concret, Wang Chao en appauvrit la portée thématique. Un peu comme d'ailleurs cette rigueur classique raide évite au film le piège de l'esthétisant, crée une ambiance aride se mariant bien au mélange naturalisme/fantastique du script mais l'empêche de véritablement décoller. Tandis que la réalisation a tendance à parfois trop se reposer sur sa lenteur et que la logique binaire précédemment mentionnée a tendance à brider le script.
Reste qu'au final le film aura imposé Wang Chao comme un auteur chinois à suivre. Mais en même temps courant déjà le risque de la pose...
Mine de rien
A sa sortie, le film désarçonnait plus d'un critique pour ne pas avoir continué dans la voie du cinéaste indépendant et clandestin comme dans le précédent "Orphélin d'Anyang". Au contraire, les paysages magnifiés (rappelant celles de "Terre Jaune" de Chan Kaige) et la réalisation bien plus maîtrisée craignaient la reconversion en un cinéaste "poseur".
Avec le recul, il paraît clairement, que WANG passait une nouvelle étape dans sa curieuse observation de l'âme humaine. Plus bressonnien que jamais, il interdit formellement à ses acteurs d'exprimer toute expression de leurs tourments intérieurs, alors qu'il les plonge dans des relations triangulaires pour les moins tumultueuses. En résulte forcément une approche quelque peu distanciée des terribles situations (avant tout) mentales, mais finalement un leitmotiv qui s'imposera à lui dans sa trilogie de la mutation contemporaine de son pays.
Il faut accepter de se laisser emporter "au bout du monde" au plus profond de la Mongolie intérieure et de souffrir en silence la peine endurée des différents paysages. Rarement un réalisateur a su montrer aussi peu de compassion pour des personnages qu'il adore pourtant profondément. Un déni de soi, dont WANG s'affranchira finalement avec son film le plus personnel à ce jour, "Voiture de Luxe".
Propagande du Parti Communiste chinois ?
Je ne vais pas faire trop long car Florent en a déjà beaucoup dit ...
Le film est très long à démarrer. On pourrait presque s'endormir et pourtant je suis habitué à ce genre de lenteur. Heureusement, l'histoire avance et on comprend enfin où l'auteur veut nous emmener et on se surprend à trouver la fin trop raide, trop rapide à venir alors que le début nous aurait presque incité à piquer un roupillon.
De belles prises de vues de ce paysage désertique, une belle photographie avec de splendides effets de lumière et de contraste.
Ce qui m'a gêné dans cette coproduction franco-chinoise, c'est tout de même le côté "officiel" du film, c'est-à-dire qu'on dirait une propagande pour le Parti Communiste chinois. On nous montre que la Chine a évolué et qu'elle se libéralise. On a du mal à croire à cette réalité.
En résumé, un film plutôt réservé aux habitués du cinéma d'auteurs et des documentaires. Amateurs d'action et/ou de blockbusters à l'Américaine, passez votre chemin ...
pour son deuxième film, WANG Chao évolue. cette évolution sera bien plus accentuée avec son film suivant, à mon avis le plus abouti, VOITURE DE LUXE.
ici on retrouve encore ces longs plans fixes, pas toujours nécessaires, ce minimalisme qui se dissipera par la suite. le cadre du film est tout aussi aride que dans L'Orphelin d'Anyang, mais ici transposé dans la campagne profonde.
je dois avouer que ses deux premiers films ne m'ont pas beaucoup séduits, je les trouve pas assez percutants dans le propos.
VOITURE DE LUXE, bien que plus "commercial" est à mon avis une réussite, traduit une nette progression à tous les niveaux, et beaucoup plus généreux.
dans le meme style d'ambiance que ce JOUR ET NUIT, je ne saurais que trop vous conseiller BLIND SHAFT, bien plus marquant. et ceux qui reproche à WANG Chao d'avoir livré ici un "film de propagande", je m'interroge toujours sur ce qui peut bien leur faire croire cela.