Ca n’a pas vieilli
Anime d’aventures à hauteur d’enfant, Horus contient dès 1968 tous les prémices des futurs classiques du cinéma japonais d’animation au cours des décennies suivantes : une grande qualité de graphismes et de réalisation, ainsi qu’un ciblage du public qui ne se limite pas aux enfants grâce à des thèmes riches et des niveaux de lecture différents. Si Horus possède en filigrane une dimension politique propre à l’époque où il fut tourné, c’est plutôt sa dimension humaniste qui fait tout son charme : les thèmes du courage, du renoncement de soi pour les autres, du rejet de l’étranger qui essaye de s’intégrer à une communauté, de la nature, et surtout du Bien et du Mal sont traités avec finesse et habileté. Hilda, par exemple, malgré son alliance avec le démon, n’est jamais perçu par Horus comme une ennemie à combattre, mais comme un être humain normal dont le libre arbitre peut lui faire choisir, s’il le veut vraiment, la voie qui lui correspond le mieux.
Plus de 35 ans après sa réalisation, Horus a plutôt bien vieilli et se regarde avec un certain plaisir.
Au commencement était le début...
Il est un terme usé jusqu’à la corde par la critique professionnelle française mais dont on ne peut faire l’économie en abordant cette première réalisation de Takahata : Horus Prince du Soleil est une œuvre "séminale", c’est le creuset où prend forme pour la première fois et de façon cohérente tout une école de l’animation japonaise contemporaine. De par les noms –plus tard prestigieux- qui sont attachés au staff et grâce à ses innovations aussi bien narratives que formelles Horus tient aussi une place à part dans l’histoire de l’animation grand public tout court. Ce statut particulier rend difficile, comme souvent dans ce genre de cas, tout approche critique qui tenterait de faire la part entre l’historique et l’artistique, le temps tendant à rendre floues les frontières entre ces deux champs... Car il est indéniable pour tout amateur du travail de Takahata (et plus accessoirement dans ce cas de Miyazaki) que cette œuvre se situe, sur le plan de la mise en scène et de l’animation, en deçà de la maîtrise dont ont fait preuve ses productions plus récentes. Ainsi qu’en a pertinemment conscience le réalisateur lui-même Horus « souffre » de certains défauts que l’on ne retrouvera plus dans les films postérieurs. Mais plutôt que de parler de défauts il s’agit bien plus de manques caractéristiques d’une œuvre de jeunesse et des difficiles conditions de sa production : manque d’amplitudes vu le type de sujet (récit d’aventure) et les enjeux du récit, manques techniques avec des scènes –importantes comme celle de l’attaque finale des loups- non animées, manque de scènes tout court (voir la présentation), manque de pauses dans la narrations (absence d’humour)... En ce sens Horus n’est pas le grand film plein de maîtrise que certains pourraient attendre mais n’en demeure pas moins un spectacle de qualité (et au-delà des standards techniques de l’époque au Japon) qui, tout en remplissant parfaitement son objectif de divertissement pour tous les âges, charrie son lot de thèmes sous-jacents : la guerre, ses conséquences sur les communautés et l’écologie bien entendu, mais aussi et surtout la question de la révolte, un sentiment de révolte que l’on ne retrouvera plus de façon aussi brute et vivace dans les films suivant de Takahata.
Horus est un film d’aventure, Horus est aussi un film politique. C’est un pamphlet. Un pamphlet en faveur d’une autre façon de faire de l’animation bien sûr, mais aussi en faveur d’une autre façon de faire la société. Et ces deux questions étaient liées... Takahata déclare lui-même que « l'ensemble des personnes ayant travaillé sur le film était farouchement opposé aux manoeuvres des Etats-Unis, nous souhaitions tous qu'ils perdent cette guerre (ndr : la guerre du Viêt-Nam). A mon avis, le film contient ce que vous appelez de la critique sociale. » Ce que ne démentent pas les propos de Miyazaki qui, évoquant l’époque de la production du film, rappelle : “ nous (Takahata, Otsuka et moi) nous disputions alors avec les responsables de la Toei qui étaient furieux et voulaient que le projet s'arrête. Nous leur rétorquions que peu importaient les remontrances des agents du capitalisme ! Nous nous battions sans relâche contre eux. » Comme toute œuvre de jeunesses Horus est donc un acte de révolte et c’est ce qui donne toute sa force au récit, ce qui fait d’Horus une œuvre vivante. On ne peut rester insensibles à l’intégrité –la franchise- du discours qui se dégage des enjeux dramatiques du récit, à la façon claire et radicale dont sont limités ces mêmes enjeux (s’émanciper de la domination du "système" par la force du collectif) qui font échos à la situation des animateurs vis-à-vis de leur studio (Takahata, lors de la conférence suivant la projection du film, insistera sur la dynamique de compagnonnage et de camaraderie au sein de l'équipe qui présidait pendant la production), mais aussi à leur position vis-à-vis de la société. Si Horus annonce avec 30 ans d’avance ce que sera le Princesse Mononoke de Miyazaki qui lui doit énormément, c’est sans les doutes et questionnements qui sont la marque de l’âge. L’un –Mononoke- est un constat poignant et désabusé quand l’autre –Horus- est un appel à l’action (et donc, paradoxalement vu la teneur plutôt sombre du récit, porteur d’espoir). L’énergie de la jeunesse ne connaît pas le doute...
Il fallait au moins ça pour que le « cinéma d’auteur » s’invite dans l’animation japonaise.
04 février 2004
par
Astec
Les premiers pas des maîtres du studio Ghibli
C'est un film qui date un peu et qui un prit un bon coup de vieux. Le graphisme est un peu basique, mais surtout l'animation trop statique. Malgré sa courte durée, le film est encore un peu longuet. Pas une pièce maîtresse, ce film est à voir par simple curiosité pour l'oeuvre de ses auteurs.
Le temps des lumières
Une date charnière dans l'Histoire de l'anime, le film recense toute la quintessence des productions actuelles du genre.
Ciblé pour un public plus adolescent, qu'enfantin, le film démarre sur des chapeau de roues avec un combat contre des loups, un géant de pierre, la mort du père, un risque de mourir dans des sables mouvants, un enlèvement par des oiseaux géants, une première rencontre avec le bad-ass du film et une chute de plusieurs centaines de mètres – et ce ne sont là que les dix premières minutes du film! Les créateurs de l'anime avaient mis la barre très, très haute – et n'avaient pu finir l'anime dans le temps, résultant dans ces quelques scènes animées à la manière d'un "photo-montage" et des dessins pas toujours affinés.
Il n'empêche, que l'œuvre est riche aussi bien narrativement, que visuellement.