Ah, les différences culturelles... Parce qu'on beau se dire que la situation des homosexuels en Asie n'est pas la meme qu'à Paris, Londres ou New York, reste que la façon dont cette comédie romantique traite l'homosexualité parait cliché et convenue. On a envie un instant de se transposer à Hong Kong au milieu des années 90 mais rien n'y fait. Rien que de voir Eric Tsang looké cage aux folles, Leslie Cheung attiré par une femme qui se fait passer pour un homme et se croyant d'un coup gay mais malgré tout incapable d'aller au bout lorsqu'il "passe à l'acte", tout cela fait un peu usé, périmé, out of fashion. Quant à la satire du show business, là encore c'est de l'enfonçage de portes ouvertes avec Anita Yuen découvrant que la vie amoureuse de ses idoles n'est pas aussi idyllique que le fait croire la presse people ou la très attendue observation de l'hystérie des groupies made in HK. Si la UFO a abordé des sujets audacieux, ici cela n'a pas été vraiment fait avec finesse. Heureusement, quelques éléments valent le coup d'oeil et font que le film se laisse regarder: l'allure très "on se croit encore dans les années 80" de ceux qui auditionnent et leurs hilarantes prestations, Leslie Cheung délivrant une version de Twist and Shout accompagné de vieux rockers aux physiques assez éloignés des Fab Four, Leslie encore qui fait son chanteur de charme de supermarché au piano (ah, les chansons mielleuses qui font partie du "charme" du cinéma hongkongais...), Anita Yuen tentant de marcher comme un mec ou faisant joujou avec les marionettes. Pour le reste, les gags sont parfois lourds et fonctionnent le plus souvent (les quiproquos multiples), le film n'est pas toujours bien rythmé mais la réalisation de Peter Chan ne cède pas trop aux penchants maniéristes vus dans le générique. Coté acteurs, Leslie Cheung est correct, Anita Yuen convaincante et Carina Lau moins mais vu son personnage on lui pardonnera. Au final, He's a Woman She's a Man est un divertissement passable qui se laisse regarder une fois sans déplaisir mais au niveau des productions de la UFO il n'est pas aussi intéréssant qu'un Comrades Almost a Love Story ou qu'un Lost and Found.
Douloureux de voir ce film datant de 1994 fin 2003, soit quelques mois seulement après le suicide de Leslie Cheung, car il explique en partie son geste tragique. Interprétant une star de la musique marié mais doutant de sa tendance sexuelle, il compose un rôle touchant d’homosexuel refoulé parvenant difficilement à se convaincre lui-même de l’être, comme dans sa vie… Outre cette curiosité post-mortem, le film de Peter Chan est une excellente comédie sentimentale réunissant un trio d’acteurs excellents (Anita Yuen déguisée en homme et Carina Lau en star capricieuse face à Leslie), et traitant d’un thème délicat peu goûté en Chine avec dignité et profondeur : Eric Tsang, qui joue la folle de service, n’est par exemple pas du tout ridiculisé dans les scènes où il apparaît ; on rit avec lui, pas de lui.
He is a woman… est aussi un film dans l’air du temps puisqu’il base la rencontre de ses personnages sur un casting style Star Academy ou Popstars, permettant de confronter des stars et des anonymes. Cela donne lieu à des scènes très drôles (l’entraînement d’Anita pour ressembler à un homme, la scène de sexe entre Carina et Leslie,…) et d’autres très émouvantes, notamment l’épilogue. Un très bon divertissement donc, dans le lignée de Tootsie ou Mrs Doubtfire.
Sur le fond, le film traite du thème de l'homosexualité sans jamais être caricatural ou trop évasif. Il se permet aussi de se moquer de l'hystérie des fans de pop à Hong-Kong, avec la petite fille de 4 ans qui vend des effets personnels de Tony Leung. L'interprétation est globalement excellente, avec Leslie Cheung toujours aussi convainquant quoi qu'il fasse, Carina Lau qui joue tranquillement son rôle d'emmerdeuse, Jordan Chan dans un petit rôle assez sympathique et surtout surtout Anita Yuen qui est tout bonnement fantastique. Sa fraîcheur et son énergie apportent beaucoup au film et on comprend pourquoi le pauvre Leslie Cheung se demande s'il n'est pas en train de virer gay à son contact. Les scènes de "formation" de Anita, que ce soit pour choisir ce qui va lui servir de ... ce qu'elle n'a pas, pour s'entraîner à marcher comme un mec avec son frère (1,2, scratch scratch), ou encore à suivre le danseur fou ou chanter sur le toit d'un immeuble sont hilarantes. Et sans oublier les scènes avec les marionnettes, où la voix bien grave de la miss fait merveille.
La musique est également un des points forts du film, avec bien sûr la présence de Leslie Cheung qui pousse la chansonnette, la musique du générique toute mignonne et plusieurs morceaux de classique très bien utilisés.
Au final, voici une comédie comme on en voit pas souvent en provenance de Hong-Kong, donc en un mot: indispensable.