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3.21/5

Gozu

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les avis de Cinemasie

6 critiques: 2.42/5

vos avis

45 critiques: 3.36/5



Xavier Chanoine 4 Bienvenue à Nagoya.
Sonatine 0 Miike le poseur ...
Ordell Robbie 1.5 Ca aurait pu etre un bon Miike...
Marc G. 4 L'inquiétante étrangeté
El Topo 2.75 Un bon Miike
drélium 2.25 abrèèèèèèèèèège !!!
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Bienvenue à Nagoya.

Si Gozu n'est pas franchement une grosse révolution dans le paysage Miikien, du fait de son thème "Yakuza" une nouvelle fois entrepris, on peut difficilement rester insensible devant ce spectacle bizarre. Du moins, peut-on réellement parler de spectacle quand le film parvient à décourager à cause de ses incroyables problèmes de rythme. Un rythme qui se veut -et à juste titre- complètement cassé, désordonné, annihilant toute implication du spectateur dans Gozu, effectivement l'on reste passif du début à la fin, éprouvé devant cette machination psychédélique où l'on ne peut que "constater" les mésaventures de Minami, yakuza totalement dépassé par les évènements.

Remarque, comment ne pas être "dépassé" quand une telle histoire lui arrive. L'homme devait escorter son boss Aniki/Ozaki quand ce dernier décéda (du moins on en n'est même pas sûr) des suites d'un freinage brusque de sa voiture. A cet instant, ce fameux Ozaki ne donne plus de signe de vie et reste affalé sur la plage arrière les yeux grands ouverts. Apeuré, Minami se pose dans un bar louche (tenu par une sorte de transsexuel), mange un étrange flanc salé accompagné d'un café, puis en sortant il s'aperçoit que le corps a disparu. Comment, pourquoi? Seule Nagoya en a le secret...

Gozu devient alors un film dans le film, multipliant les références. L'univers est étrange, instable, proche d'une dimension parallèle à la Cronenberg (ExistenZ), reposant sur des bases déjà étudiées auparavant par David Lynch (l'incohérence/cohérence de Lost Highway, la ville paumée à la Twin Peaks), le tout à la sauce Miike c'est à dire dépourvue de quelconque logique du moment que l'ensemble tourne bien. C'est ainsi que l'on verra, au gré du parcours de Minami, des propriétaires de chambres d'hôte complètement dérangées (la patronne est une fabrique de lait à part entière, perverse à ses heures perdues, le "frère" est un être dans les vaps, martyrisé par cette dernière), on y verra aussi un homme à tête de vache ainsi que toute une panoplie de personnages pathétiques (deux loosers qui passent leur temps dans un bar, un indicateur au visage pourris) en particulier la "réincarnation" d'Ozaki en femme. Le procédé est aussi déjanté car cette femme accouchera par la suite de ce même Ozaki (une des scènes marquantes du métrage) suite à une partie de jambe en l'air hilarante et de très mauvais goût. C'est justement la faiblesse de Miike, dans cet étalage de séquences souvent douteuses (le bain de Minami, des propos zoophiles) côtoyant des passages purement formidables et inexplicables (le long road-movie du héro, son changement de comportement au fur et à mesure que l'univers se détruit) dans un non-sens cinématographique absolu. Tout bêtement, il serait vulgaire de caractériser Gozu de "succession de scénettes" incohérentes, prétexte à Miike d'enchaîner avec un nouveau film. C'est plutôt une vision apocalyptique, sorte de bad trip Yakuza où l'on y verrait des types apeurés par un chien "anti-yakuza" et une voiture "anti-yakuza", plutôt étonnant quand on connaît la droiture des membres de ce genre de clan. De plus, Miike se permet de régler quelques comptes en réduisant les boss à de simples pervers sadomaso, le meilleur exemple est lors de cette réunion du clan lorsque le grand patron pose comme première question : "Alors tu te l'ai faite?". Inutile aussi de parler des pratiques sexuelles de ce dernier...

En bref, Gozu est un objet cinématographique difficilement identifiable, propre vision déjantée de la société par un réalisateur tout aussi déjanté, lequel nous amène par différents moyens à se faire une propre idée du monde présenté, à choisir ce qui est réel ou pas, de faire le tri en quelque sorte de ce qui est bon, mauvais, glauque...la liste est longue. Ca n'a peut-être pas de sens (encore que), et ce n'est pas cette fin incroyablement brusque qui nous fera dire le contraire, mais l'ensemble se suit avec beaucoup d'attachement, on reste curieux et pressé de voir comment toute cette zizanie va se terminer. C'est pourquoi ce métrage mérite une excellente note, comme il pourrait aussi être carrément pointé du doigt. Il faut le voir pour le croire. Ca ne s'explique pas.

Esthétique : 4/5 - Hormis ces teintes jaunes dégueulasses, l'univers proposé mérite un cigare. Musique : 2.5/5 - Très peu de musique, juste quelques envolées sombres et inquiétantes. A l'image de son univers. Interprétation : 3/5 - Sho Aikawa en fait des tonnes, mais reste amusant. Hideki Sone est génial. Scénario : ?/5 - Suffisamment dense pour poser débat, mais souvent inaccessible.



28 septembre 2006
par Xavier Chanoine




Ca aurait pu etre un bon Miike...

Malgré quelques bonnes surprises de la part de Miike, Gozu laisse également un fort sentiment de gachis face à ce qui aurait pu etre un Miike vraiment réussi. Déjà parce que sa photographie est meilleure qu'à l'accoutumée chez le cinéaste et surtout parce que la mise en scène de Miike n'a jamais été aussi maitrisée (tout est relatif). L'autre élément qui aurait pu en faire quelque chose de réussi, c'est le fait que cette fois le scénario n'est pas bourré de scènes bouche trous entre les idées délirantes (ce qui n'empeche pas, on le verra plus pas, que le film ennuie trop souvent) mais au contraire son délire est construit, avec une progression narrative logique. Bien sur, on est à des années lumière des vrais grands surréalistes du celluloid (Bunuel et Suzuki, Miike tentant parfois comme ce dernier d'utiliser le montage pour créer du décalage sans l'égaler et de loin) mais c'est toujours ça de pris. La narration y progresse par la répétition d'un certain nombre de lieux plusieurs fois visités par les personnages, d'un certain nombre de motifs (le personnage qui voit un chien anti-yakuza puis une voiture anti-yakuza, les disparitions de passagers d'une voiture alors qu'un personnage a le dos tourné, les gouttes qui tombent sur le sol, l'idée de fantome avec certaines ambiances très ringiennes ou celle de réincarnation dans un autre corps), bref il y a un vrai fil conducteur narratif.

Mais où cela mène-t-il -pour moi en tout cas:)-? SPOILERS A la symbolique grosse comme une maison de l'Aniki/figure paternelle qui fait mine de soutenir son acolyte/fils puceau complexé dans sa virilité (l'opération du pénis qu'il a subi) dans ses élans vers le sexe opposé tout en ayant une présence trop castratrice pour qu'il puisse vraiment passer à l'acte. C'est son éclipse provisoire qui permet à l'acolyte de se confronter dans sa recherche à une figure maternelle -la gérante de l'auberge- qu'il refuse, puis de surmonter ses frustrations pour passer à l'acte, passage à l'acte où le fils affronte littéralement la volonté castratrice de son père; une fois ceci fait, le film peut s'achever dans le calme par la création d'une forme de cellule familiale -le trio de la fin-. FIN SPOILERS Derrière les circonvolutions d'esprit surréaliste, on ne trouve donc que du Freud méthode Assimil. Comme toujours chez Miike on fait du gros vent pour ne pas dire grand chose d'intéréssant. Et à coté de ça, il y a le fait que s'il n'y a pas de bouche-trous entre les idées délirantes celles-çi sont très très loin de vraiment fonctionner (l'électrocution d'un personnage, la gérante qui torture un personnage, le final jouissif, oui mais pour très peu d'idées réussies combien d'idées poussives ou d'absurde lynchien à deux francs? le principe de répétition induit par la progression narrative du film n'arrange rien lorsqu'une idée ratée revient plusieurs fois...) et puis le fait que s'il filme mieux Miike devrait embaucher un vrai monteur parce qu'à l'évidence il ne sait pas quand couper ses scènes, finissant par susciter l'endormissement durant une grande partie du film. Il se défend en interview en disant qu'il cherche à ennuyer le spectateur durant ses premières parties de film pour créer un contraste avec des fins plus enlevées.

Le problème, c'est que le plus souvent Miike arrive trop bien à ennuyer le spectateur pendant ses deux premiers tiers de film ce qui fait que malgré ses finals souvent réussis (le dernier tiers est ici le meilleur du film) une sensation de ratage, de déséquilibre, de film beaucoup trop long (les bons moments ne contiennent même pas de quoi remplir une bonne série B) domine. Et encore plus ici, dans un Miike qui avait une vraie structure narrative et qui aurait pu etre un sympathique petit délire surréaliste si le cinéaste avait mis en veilleuse son gout pour l'esbroufe.



21 juin 2004
par Ordell Robbie




Un bon Miike

Quelques légers spoilers…

Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs cannoise puis à Gérardmer, Gozu est le on-ne-sait-plus-combien-tième film de Miike Takashi. Indubitablement frappé du sceau de son auteur de par ses thèmes, ses qualités, mais aussi ses défauts, Gozu propose comme à l’accoutumée des yakuzas, des personnages bigarrés, des digressions paraphréniques, du mauvais goût, du sexe déviant (et outré aussi), de la violence outrée (et déviante aussi), des problèmes de rythme, un scénario ficelé on ne saurait trop dire comment, un décalage complètement assumé, Aikawa Sho… bref tout ou presque ce qui fait la substantielle moelle du cinéma fou de Miike Takashi. Pourtant, à sa manière, Gozu fait preuve de singularité. D’abord parce qu’aucune idée délirante signée Miike ne ressemble à une autre et l’on se délectera avec un plaisir toujours aussi coupable de toutes les absurdités qui font l’univers foutraque de Gozu : l’Oyabun en mal de virilité, le chien anti-yakuzas, l’accouchement… De plus, si les similitudes avec les City of the Lost Souls et autres Dead or Alive sautent aux yeux, la trame de Gozu se démarque finalement par sa cohérence. Certes, rarement scénario ne sera parti dans autant de directions à la fois, mais les multiples digressions surréalistes ne sont jamais que de menus détours et ne sauraient obvier au dépucelage final vers lequel tout concourre en réalité. De plus sous les faux airs de road-movie lynchien (avec des films comme Mulholland Drive ou Lost Highway, Gozu a en commun la propension exacerbée à d’interminables parenthèses chimériques et le goûts pour les incohérences assumées, du moment qu’elles procèdent du projet de mise en scène) aux à-côtés buñuelisants, se cache en définitive une des mises en scène les plus réussies de Miike ; la réalisation est de bonne tenue et, comme trop rarement dans le cinéma du Japonais fou, tous les éléments du filmage semblent faire corps pour former un véritable ensemble et pas un pot-pourri foutraque aux allures de boîte à idées égrillardes. Certes, Gozu reste trop long, bourré de petits défauts et on pourra toujours remettre en doute la sincérité d’un cinéaste qui semble en faire toujours plus pour répondre à sa réputation d’artiste hype et déviant, mais à l’opposé de bon nombre de réalisations antérieures de Miike, ce film procure un réel plaisir de cinéma et apparaît vraiment comme une véritable œuvre un tant soit peu habitée et pas un squelette animé par la vermine qui le peuple ou une collection de vignettes trash et décalées. C’est déjà ça…



28 mars 2004
par El Topo


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