Le Bel Eté
Un Eté chez Grand-père, ce n'est rien de plus que son titre et c'est pourtant un été s'offrant dans sa densité d'évènements et sa densité humaine. Dire que pour cela il faille un dispositif sans fioritures et d'apparence simple mais une narration préférant les chemins de traverse à la ligne droite. Pour ce cadre sans joliesse offrant le monde avec un naturalisme brut, on pense à un cinéaste beaucoup admiré par Hou Hsiao Hsien à l'époque: Maurice Pialat. Mais un Pialat où la colère serait moins hystérique, un Pialat moins gueulard. Il ne faut pas oublier qu'avant de devenir le cinéaste que l'on sait Hou Hsiao Hsien a eu une jeunesse de voyou finalement pas si éloignée des machos bourrus du regretté cinéaste français. Les petites frappes, on les retrouve d'ailleurs ici. Ce sont elles qui intiment aux gamins de passer sans regarder pendant qu'ils volent des conducteurs. Ce sont les liens d'enfance de ces derniers avec un des vacanciers qui font que le vacancier demande à un des enfants de ne pas les dénoncer. Interrogé par la police, il se taira aussi. Comme si finalement les liens des amitiés viriles comptaient plus que la morale...
Un Eté chez grand-père nouveau "film d'hommes" après Les Garçons de Fengkuei? Cela se défend. La question du groupe masculin est présente très tôt dans le film. Un gamin en vacances s'amuse à crasher une voiture téléguidée contre une tortue. Des gamins du village curieux s'attroupent autour. Et après s'être concentrée sur eux la mise en scène pointe son regard sur la gamine en vacances solitaire. En peu de plans tout est dit sur la formation d'un groupe masculin et les possibles antagonismes entre ce groupe et elle. Deux évènements d'apparence anodine mais se révélant forts du film auront d'ailleurs ce point-là comme origine: le tour qu'elle joue aux garçons en jetant à l'eau leurs fringues pendant qu'ils se baignent entraînant la punition de l'un d'eux, la course poursuite entre elle et les gamins où elle sera sauvée d'un accident de train par une villageoise.
La narration du film fonctionne d'ailleurs non en ligne droite mais par le dialogue s'instaurant entre divers blocs de scènes du film. Comme ces trois moments espacés: le moment où les enfants regardent une villageoise glander, le moment où cette dernière sauve la fille en vacances et les adieux de fin où alors que tout le monde pense aux adieux familiaux la petite fille regarde au loin celle qui l'a sauvée par exemple. C'est dans ces dialogues internes-là que s'affirme la richesse humaine infinie des moments les plus anodins de l'enfance et de l'adolescence. A la fois simple en apparence mais d'une grande modernité narrative. Pour tout chargé culturellement qu'il soit (le goût de la durée et la distance à son sujet évoquant le théâtre de marionnettes chinoises), le style HHH colle d'ailleurs aussi ici par son travail sur le cadre, la durée et le son (les bruits de criquets obsédants) parfaitement à l'atmosphère caniculaire de cet été rural. Film d'hommes, Un Eté chez grand-père est aussi un film de la famille. Il est un film où l'on observe les effets des évènements d'un été sur la cellule familiale. On y voir également les effets des traditions villageoises notamment incarnées par un grand-père à la vision des choses semblant bien arrêtée sur la vie quotidienne des enfants en vacances et même sur la vie amoureuse des personnes présentes dans le village à ce moment-là. Cette question de la cellule familiale et de sa mise en danger se retrouve à des degrés divers dans l'oeuvre de Hou. Les tumultes historiques taïwanais se répercutent sur la famille de La Cité des Douleurs. Le groupe de potes des Garçons de Fengkuei est une forme de cellule familiale de même que le groupe de Japonais accueillant Shu Qi à la fin de Millenium Mambo incarne une forme de nouvelle cellule familiale alternative à celle éclatée du Taïwan contemporain. De même que le bordel des Fleurs de Shanghaï incarne aussi une forme de petite famille à la vie codifiée et ritualisée.
Développer des personnages féminins plus consistants, aspirer par la narration et le dispositif à une perspective historique plus large, Hou Hsiao-hsien le fera par la suite. Ce qui n'empêche pas Un Eté chez Grand-père d'être très abouti à un niveau en apparence plus modeste. Et d'offrir après Les Garçons de Fengkuei un nouveau coup de grâce à son cinéma.
Une magnifique ode à l'enfance
Hou Hsiao Hsien est décidément un grand cinéaste. Son œuvre, authentique, réfléchie et très personnelle, inspire une forme de grâce impossible à retrouver chez n'importe quel autre auteur.
Un été chez grand-père constitue le premier volet d'une trilogie basée sur la cellule familiale et la phase intermédiaire entre l’enfance et l’adolescence à laquelle de nombreux souvenirs de jeunesse du réalisateur sont rattachés. On assiste donc aux vacances estivales de deux enfants venus passer du temps à la campagne cher leur grand-père, toubib local et homme froid aux principes moraux inébranlables. La mère doit subir une importante opération chirurgicale et le père travaille, tandis que le jeune oncle des bambins les accompagne du mieux qu'il peut durant ce séjour. Appliquant sa démarche de mise en scène habituelle, à la fois tout en retenue et d'une admirable simplicité, HHH nous convie à un tendre recueil d'instants a priori des plus ordinaires mais qui acquièrent une réelle saveur sous la houlette du cinéaste, lequel illustre tous ces petits faits et gestes non sans sincérité et dirige ses comédiens (les plus jeunes y compris) avec une justesse rare. Aussi s'émerveille-t-on devant ces baignades de gosses, ces courses de tortues, ces glissades sur le sol dans la maison du grand-père ou encore cette charmante relation entre la petite sœur et une jeune vagabonde pleine de bonnes intentions. Il règne par ailleurs dans ce film une délicieuse ambiance saisonnière distillée par l'aridité des paysages et le bruit omniprésent des criquets. En un sens,
Un été chez grand-père peut représenter l'antithèse de la précédente œuvre de Hou Hsiao Hsien,
Les Garçons de Fengkuei, puisqu'il traite de la découverte du monde rural par des citadins là où le second métrage mettait en scène l'initiation à la jungle urbaine des habitants d'un petit village. Quoique sensiblement différents dans leur approche (le style est ici encore plus dépouillé et gagne même en maturité), les deux films se montrent aussi prenants et aboutis l'un que l'autre et définissent déjà pleinement le génie de leur auteur avant le summum de
City of Sadness. Une superbe chronique sur l'enfance dont la pureté n'a d'égal que la douceur.
Un film tres frais !
Peu de musique, peu de dialogue, mais juste des regards d'enfants qui en disent bien plus devant des scenes de joie, de violence, de tristesse, ou d'injustice.
Ces 2 petits personnages jouaient merveilleusement bien leur role, si bien que j'ai fini par oublier que j'etais devant un film.
Tres frais, tres vrai. A voir sans hesiter !!!
14 octobre 2006
par
PINGU
Aller simple vers l'enfance
A travers le regard de deux personnalités enfantines très différentes ( un frère aîné déjà assez raisonnable et une petite cadette déjà assez rebelle ), on vit un été à la campagne, dans un petit village, comme un condensé de toutes les péripéties, tous les jeux, toutes les rencontres ou les petits drames familiaux dont on a pu faire l'expérience pendant les grandes vacances.
Doucement, subtilement, HHH nous place dans une machine à remonter le temps filmique d'une redoutable efficacité. Puis, quand on dans l'état d'esprit adéquat, zou, c'est l' aller simple direction l'enfance.
Et tout ceci en nous évitant les lieux communs qu'on voit d'habitude dans les films avec des enfant...Parce qu'il fait de ses deux personnages principaux, non des caricatures d'adultes inachevés, mais des êtres humains, avec une personnalité, une volonté, des sentiments, des conflits intérieurs, des réactions logiques, cohérents et propre à l'enfance. Il leur fournit également toute une panoplie de personnages secondaires attachants et merveilleusement justes avec lesqules interagir. En tout cas, pour moi, l'effet miroir a été maximal !
Et la mise en scène est à l'aulne du propos, discrète, subtile.
Un beau film, vraiment.
La nostalgie d'une jeunesse à Taïwan dans les 80's.
Très bon film signé HHH.
Une oeuvre assez peu connue de sa filmo et qui pourtant m'a le plus touché.
A voir assurement si vous en avez l'occasion !
Un Bon HHH peu connu
Ce film est malheureusement très difficile a voir sur les écrans. C'est bien dommage car on y retrouve toutes les qualités du cinéma d'HHH, sa façon toute personnelle de filmer les petits moments de la vie, les détails, qui semblent sans grande importante mais qui finalement vous faconnent une personnalité, vous font naitre un desir.
Ici, il s'attarde sur des souvenirs d'enfance: drole, insouciant parfois cruel. Un régal.