Après un New Police Story mal construit et manquant singulièrement d'imagination, Benny Chan nous redonne ici un peu d'espoir. Certes on n'arrive pas au niveau d'Heroic Duo ou de Big Bullet, mais la prise de risque est tout de même bien réelle. Ces histoires croisées qui sont plutôt dans l'air du temps et servent de base au scénario présageaient après les premières 30 minutes pas mal de bonnes choses. Malheureusement, l'imbrication des destins croisés n'est pas assez poussée et surtout Benny Chan se plante dans les parties romancées. Pour lui qui avait débuté sa carrière par le magnifique A Moment of Romance, les histoires d'amour sont vraiment devenues le point faible de ses films: manqueur de profondeur des sentiments, clichés à la limite du ridicule comme quand la voiture d'Aaron part en marche arrière, cela vient vraiment plomber l'atmosphère du film. Parce que par ailleurs, il sait filmer le bougre, la scène du marché est sur ce plan magnifique. Même lorsqu'il se permet quelques facilités comme dans la scène d'introduction, il faut reconnaître qu'il arrive à créer une atmosphère. Le contraste est d'autant plus grand lorsqu'il il aborde l'histoire d'amour du personnage d'Aaron Kwok. Le décalage est certainement volontaire et Aaron fait de son mieux pour tenir ce grand-écart, mais ça ne passe pas. Comparativement, l'histoire du personnage joué par Daniel Wu qui est pourtant peu développée est plus intéressante. Quant au personnage d'Ekin Cheng, si le scénario peut justifier sa faible participation à l'intrigue pour la plus grande partie du film, il n'apparaît guère convaincant sur le final ce qui ne favorise guère l'appréciation que l'on peut porter sur le film. Benny Chan restant avant tout un réalisateur purement commercial, il a finalement manquer d'un peu de courage pour oser sortir un peu plus des sentiers battus comme en témoigne la dernière scène de Daniel Wu totalement dispensable.
Au final, on a l'impression que Benny Chan a voulu prendre quelques risques en produisant et réalisant ce film ce qui est tout à son honneur après nous avoir livré un film comme New Police Story, mais qu'en dehors de sa maîtrise technique des scènes d'action, ce film révèle pas mal de ses limites même s'il se laisse voir sans problème. A noter aussi une bande originale d'Anthony Sue que certains pourront qualifier d'hollywoodienne, mais vient relever l'intérêt du film, un compositeur qu'il faudra peut-être suivre.
Divergence contient deux scènes d'actions efficaces exécutées sans trop d'épate: la longue course poursuite et la scène précédant le climax final pluvieux. Dommage simplement qu'en tant que thriller psychologique le film soit raté. On peut déjà commencer par relever que le film de Benny Chan ne comporte strictement rien pouvant ressembler de loin ou de près à une touche HK. Meme plus ici de passé dans le rétroviseur comme dans Infernal Affairs et New Police Story. Le scénario pourrait aussi bien se dérouler à New York ou à Séoul tandis que la forme fait trop souvent penser à ce qu'on voit chez le voisin sud-coréen: photographie propre sur elle, mouvements de caméra que pourrait faire le premier yes man hollywoodien venu et score pastichant les blockbusters US. Bref du cinéma à la qualité de finition technique inversement proportionnelle à son originalité. Et quand la mise en scène se fait plus stylisée elle oscille entre cliché visuel (l'usage convenu du ralenti) et épate (l'utilisation de la caméra subjective, des filtres chromatiques, de l'accélération du montage). Original le script? Non, finalement assez académique avec ses twists à pur effet coup de théatre et son accumulation de "hasards et coincidences" artificiels. Et accessoirement indigestes sur une durée aussi courte. Artificiel, le film l'est encore plus lorsqu'il tente de faire se rejoindre les destinées des personnages sur la fin ou avec sa dernière pirouette dont la seule finalité est celle de bouche-trou narratif. Le film n'évite pas non plus la mièvrerie dans ses passages intimistes. Le casting? Daniel Wu est très bon, Aaron Kwok s'en tire correctement à contre-emploi ce qui est loin d'etre le cas d'Ekin Cheng. Ce dernier est fade la plupart du temps et très mauvais lors du climax final. Divergence ne fait au final que pointer les limites actuelles du "nouveau" cinéma de Hong Kong. Plus de finition technique, plus d'ambition en terme d'écriture scénaristique mais une grosse perte d'originalité et du script n'ayant pas les moyens de ses ambitions. Heureusement qu'un Johnnie To ou un Chow Sing Chi arrivent encore à concilier professionnalisation et conservation de ce que faisait la singularité de HK.
On peut distinguer trois périodes dans la carrière de Benny Chan: une période simple, une période pop et une période plus complexe. Le fleuron de la période simple, c'est bien sur Moment of Romance, tout est dans le titre, un moment de romance, point barre, rien d'autre, l'élogue de la simplicité. La période pop, c'est les pas si daubeux Gen X/Y Cops, enfin la période plus complexe est celle des Heroic Duo, New Police Story et ce Divergence. Quand je dis plus "complexe", je n'entends pas non plus des scénarios tortueux, mais plutôt des intrigues un peu plus touffues, tentant d'ajouter un peu de drame à l'action. Les deux prédécesseurs n'étaient pas pleinement réussis, un Heroic Duo sympa mais aux acteurs manquant de charisme, un New Police Story encore un peu trop Chanien et EMG pour être la bombe attendu. Reste ce Divergence, au casting toujours trop pop mais aux ambitions plus sincères, Universe tentant de se racheter une conduite artistique depuis One Night in Mongkok.
L'action est ici encore plus rare que dans Heroic Duo, Divergence est avant tout une histoire de personnages dont les routes se croisent. Trois personnages principaux, voire même cinq si l'on compte la femme de l'avocat et l'homme d'affaire. Trop de personnages pour un Benny Chan qui ne réussit vraiment à en développer qu'un, celui d'Aaron Kwok. C'est bien là le plus grand défaut du film, il lui manque 20 minutes pour développer plus ses personnages et impliquer le spectateur. Car ni Ekin Cheng, ni Daniel Wu, qui font leur travail assez correctement, ne parviennent à faire croire en leur personnage. Seul Aaron Kwok, à nouveau à fond dans son rôle nous y faire croire autant qu'il y croit. On peut apprécier la noirceur du film, maintenant de plus en plus commune dans les films HK récents: personne n'est blanc, personne n'est noir, tous les personnages sont sur la brèche, et l'ambiance du film n'est jamais à la blaguounette. A ce niveau aucune concession n'est faite, c'est une bonne surprise pour un film aussi commercial.
Hélas le scénario, outre son développement un peu lacunaire, est parfois un peu compliqué à suivre, et entremêle plusieurs histoires avec un manque de limpidité. Il tente de mêler action, thriller et drame à parts égales, mais ne réussit finalement à convaincre sur aucune. Benny Chan s'en sortait bien mieux sur les intrigues simplistes de son début de carrière mais peine à tirer le meilleur d'intrigues plus complexes. Le scénario n'est pas forcément à mettre en cause, Ivy Ho étant une scénariste avec un sacré CV (Ann Hui, Peter Chan...). Mais entre la durée un peu courte du film et la question de savoir si Benny Chan sera jamais capable de diriger un projet de cet ampleur, on obtient un film intéressant sur le papier, mais pas pleinement convainquant à l'écran.
Autrement techniquement le film se montre bien sûr au niveau des standards actuels, photographie nickel, moyens conséquents, scènes d'action correctement troussées à défaut d'être innovante, musique de circonstance manquant d'âme, internationalisation du scénario pour le rendre plus exportable, casting très dense avec des stars en second voire troisième rôle (Eric Tsang, Sam Lee, Yu Rong-Guang...).
Reste alors la sincérité de l'ensemble, notamment celle du casting avec en tête un Aaron Kwok qui démontre film après film qu'il n'est sûrement pas l'acteur du siècle mais qu'il est tout à fait capable de gérer plusieurs types de rôle. Donc objectivement, Divergence est tout comme les précédents Benny Chan un film correct, dont les défauts contrebalancent les qualités. Subjectivement, c'est à nouveau un projet sincère de personnes appliquées dans leur travail, et qui mérite donc la sympathie pour ceux qui les suivent depuis quelques années. Pour l'effort donc, plus que pour le résultat hélas...
Autant j'ai du mal à lui touver de vraiment gros défaut, autant j'ai l'impression de m'être relativement ennuyé. Le film se focalise sur trois personages qui ont chacun une conception bien personnelle de la justice, avec des principes complètement différents. En effet, Ekin Cheng campe un avocat qui montre bien que la loi ne permet pas de résoudre les problèmes mais rend la police plus faible par rapport aux criminels ; Daniel Wu est quant à lui un tueur qui a un certain sens éthique, refusant les dommages collatéraux et n'acceptant des contrats que sur des criminels ; et enfin Aaron Kwok est un policier qui veut régler ses affaires comme un bon flic, dans le respect de la loi. Ce qui est agréable à noter, c'est que les trois acteurs jouent très bien. La surprise est pour moi Aaron Kwok, que je n'avais vu que dans China Strike Force (j'avoue que c'est mince), et qui révèle ici un jeu dramatique que je ne lui connaissais donc pas.
Par ailleurs, la réalisation me parait assez lente et plutôt ennuyeuse sur la longueur. L'ambiance mélodramatique n'aide pas vraiment à rester concentré mais l'enchaînement scénaristique est correct. Il est intéressant d'avoir rajouté l'histoire de la fille disparue, qui explique l'état d'esprit du personnage d'Aaron Kwok, mais c'est souvent assez lourd et ralenti le rythme du film. Enfin, le film est relativement intéressant mais il faut avouer que son développement assez lourd casse le rythme et est un peu ennuyeux au court du film.