Xavier Chanoine | 0.75 | Allez, on montre tous Webber du doigt et on rigole. |
Ghost Dog | 1.25 | Inutile prequel |
Qu'elle était belle l'année 91, avec l'arrivée d'un monument du thriller psycho, Le silence des agneaux du correct Jonathan Demme. Personne ne s'était trompé sur le sujet, Anthony Hopkins, Jodie Foster récompensés aux Oscars, plus une autre statuette pour le meilleur film, scénario, etc. Un cigare pour toute l'équipe donc. Hannibal 10 ans plus tard par Ridley Scott, film aussi génial que mésestimé signant le grand retour d'Hopkins dans la peau du serial killer raffolant du foie accompagné de feves au beurre, servit avec un Chianti. Julianne Moore n'a pas le charisme de Foster, certes, mais la machine fonctionnait tout de même vachement bien. Dragon Rouge, vilaine série B au scénario confus et tiré par les cheveux, réduisant le personnage d'Hannibal Lecter en gentleman de pacotille adepte des bonnes choses. Très -inutilement- violent. On pensait la franchise définitivement abandonnée, mais la mode des films d'horreur mainstream du cinéma US est au jour d'aujourd'hui au remake ou à la prequelle histoire de faire renaître les légendes du cinéma d'épouvante. On pense notamment à Massacre à la tronçonneuse du surestimé Hooper (juste un honnête artisan de série B), remaké puis affranchis d'un nouveau "au commencement". On pense aussi à La Malédiction de Richard Donner, nanar du cinéma horrifique des seventies au casting bien classe. L'exorciste de Friedkin et ses innombrables suites puis "au commencement" sorti il y a deux ans, Zombie de Romero, monument ultime de l'horreur associé à une véritable dénonciation, remaké par Snyder (réalisateur de pub) pour en faire un pop-corn movie de bas étage. Grosse surprise, cette année Hannibal Lecter a droit à un joli portrait de son adolescence, badigeonné de feutre gras par Peter Webber.
Hannibal est un jeune enfant séparé de ses parents suite à leur assassinat par les avions allemands (une intro digne d'un film de guerre du pauvre). Il se retrouve seul avec sa soeur Micha quand une troupe de soldats SS débarque dans leur demeure pour les déguster. Hannibal, pas content, va tout faire pour les retrouver et les liquider un par un. Pas sûr qu'il connaisse la recette du foie aux fèves au beurre, bien trop classe pour lui, il décide donc de retrouver la piste des soldats 8 ans plus tard pour arracher leurs joues, ou les faire mourir dans d'atroces souffrances (découpés au katana, égorgés au poignard, noyés dans une piscine de cadavres...). Par chance, il découvre qu'une tante vit à Paris. Cette tante, "lady Murasaki" (qui n'est autre que Gong Li, la pauvre), va tout faire pour le protéger jusqu'à ce qu'il en fasse trop, car le Lecter interprété par le catastrophique Gaspard Ulliel est ici réduit au simple type vengeur, loin de l'image du serial killer qui tuait "par plaisir" dans les opus précédents. Son but est de tuer, tuer et passer ses nerfs sur les méchants pas beaux. Bien aidé par le scénario lamentable d'un Thomas Harris opportuniste à qui l'on devait les oeuvres originales (où est donc passé l'auteur du Silence des agneaux?), de dialogues crétins, vulgaires et à peine dignes d'une série Z de fin de soirée, d'une interprétation entre le surjeux et le copycat d'Hopkins (rappelons que Gaspard Ulliel, malgré ses apparitions dans des films dits "prestigieux" est loin d'avoir fait ses preuves), d'une Gong Li perdue (malgré ses efforts louables et sa beauté naturelle) dans le rôle d'une japonaise (sic) bercée par la culture samouraï, d'un score pompant celui d'Howard Shore et de 2046 (ah mais Umebayashi est crédité, pas étonnant), Les origines du mal se retrouve donc entre la blague pas drôle et l'hommage raté à une légende du thriller. J'oubliais, l'ensemble est filmé avec les panards et trois grammes d'alcool dans le sang. Après cela, le prochain Hannibal Lecter peut très bien être le spectateur lui-même...
L'intérêt d'un 5ème volet des histoires d'Hannibal Lecter (si l'on inclut l'opus de Michael Mann) qui reviendrait sur "les origines du mal" était à démontrer. Il ne l'est pas. Sur la base d'un scénario d'une nullité confondante ressassant sans scrupule le thème archi-traité de la vengeance, soit une sorte de Kill Bill du pauvre, le film de Webber brille surtout par le fait qu'il n'est pas crédible une seule seconde. Gaspard Ulliel a beau montrer les dents et servir son regard de pervers du début à la fin, impossible d'imaginer son personnage 20 ans plus tard sous les traits d'Anthony Hopkins. La piste lituanienne nazie empruntée ici, comme celle du repas fait avec sa soeur, ne mène qu'à l'incrédulité d'un spectateur qui ne sait plus si c'est du lard ou du cochon. Quant à Gong Li, on se demande encore ce qu'elle fait là, à moins qu'elle ne nourrisse de longue date des fantasmes sur les lèvres de notre Gaspard national qu'elle finit par croquer sensuellement...