Retour à Zalem
Ashman est un one-shot de
Yukito Kishiro, également auteur de
Gunnm et de
Gunnm Last order. Il existe d’ailleurs un lien entre ces manga puisque toutes ces histoires se déroulent dans le même univers. En effet, lors de ses aventures à Zalem, Gally avait découvert le motorball, sport futuriste que le lecteur est invité à redécouvrir dans Ashman. C’est du moins ce que semble indiqué la couverture de l’ouvrage.
Le motorball, c’est quoi ? Et bien c’est un peu le roller du futur. Rien de palpitant me direz-vous, sauf que les concurrents s’élancent sur une piste qui monte et qui descend comme des montagnes russes et cela à plus de 300 km/h grâce à leur corps mécanique. Pour corser le tout, ils doivent s’affronter pour la possession d’une balle qui ressemble à une boule de bowling, tous les coups étant évidemment permis. Vous l’aurez compris, le motorball est un sport violent, fort en adrénaline. D’ailleurs, ce n’est pas l’aspect sportif de la compétition qui intéresse le public, mais plutôt son aspect spectaculaire. D’où la popularité de Snev, héros malheureux de ce manga puisque malgré des prédispositions pour le motorball, il termine toujours ses courses en 1000 morceaux. Ou plutôt, il ne les termine pas.
Au travers du motorball, ce sont toutes les dérives du monde sportif tel qu’il est aujourd’hui qui transparaissent : prééminence des intérêts financiers, utilisation de produits dopants pour améliorer les performances des coureurs, paris, matchs truqués. Dans la même logique, il faut toujours faire plus d’audience, c’est pourquoi Snev est invité par son patron à se crasher pour le bon plaisir de la foule. Le souci, c’est que Ashman n’apporte pas grand chose par rapport à Gunnm, qui à mon sens offre une description plus riche et détaillée du microcosme motorball. D’autre part, le motorball est la caricature typique du sport futuriste forcément violent, Yukito Kishiro s’étant sans doute inspiré du film
Rollerball. Dans Gunnm, ce qui fait l’attrait du motorball, ce n’est donc pas tant son originalité, mais le côté impressionnant et sans concession des courses, ainsi que le charisme des participants (Jashugan, Caligula, Zaphal Takié, etc). Ces éléments sont absents dans Ashman : les passages où Snev court manquent d’envergure (où sont les combats ?) et l’adversité a pour seul nom Dolagunov, coéquipier du héros. Décevant.
A vrai dire, si le motorball occupe finalement une place secondaire, ce n’est pas parce que Yukito Kishiro n’a pas su s’y prendre mais parce qu’il en a décidé ainsi. Si certains regretteront ce choix, moi le premier, il ne faut donc pas s’y tromper : Ashman n’est pas un manga sur le motorball mais un manga qui s’intéresse au mal-être d’un homme au sein d’une société qui ne semble pas avoir d’avenir. Snev, car c’est de lui qu’il s’agit, ne parvient pas à finir ses courses et s’interroge sur les raisons de ses échecs répétés. Au fil des pages, la réponse semble prendre forme, le lecteur découvrant un personnage déprimé, paumé, ne trouvant sa place ni son but dans une ville à la dérive, déshumanisé, où la violence fait loi et dont le motorball n’est finalement que le symbole. Hélas, si l’intrigue est très bien menée, celui qui a lu Gunnm connaît déjà Zalem et toutes les problématiques qui y sont liés. D’où une nouvelle fois cette impression que Ashman n’apporte pas grand chose de neuf.
La nouveauté, il faut la chercher du côté du style graphique adopté par le mangaka, qui a en effet changé ses habitudes en adoptant un style qui peut être perçu comme un hommage aux travaux de
Frank Miller. Si Gunnm fourmille de détails, les dessins d’Ashman sont sobres et dépouillés, Yukito Kishiro laissant de côté les trames au profit de la technique des aplats. Le résultat final est surprenant mais ne plaira pas à tout le monde. Personnellement, je n’accroche pas trop.
Dans tous les cas, cette expérimentation graphique ne parvient pas à faire oublier le manque global d'inspiration de Yukito Kishiro. Ashman, ce n’est finalement qu’une histoire (sympathique) de plus se déroulant dans l’univers de Zalem. Dispensable.